VIIe Congrès, Libreville (Gabon) 2019
Libreville a abrité le premier congrès africain en médecine personnalisée…
« Médecine personnalisée en Afrique: rencontres pour une santé mondiale »
Après une pause de restructuration, l’AIICM a repris la création scientifique d’événements internationaux avec la mise sur pied, sous l’égide du groupe Hygeia d’une activité d’un type nouveau.
Violaine Lemay et Marie Hatem, membres des cofondatrices du Groupe Hygeia dédié à l’autonomisation en santé des femmes et filles de la francophonie (aux côtés de Dr Étienne Lemarié/CIDMEF)
Contrairement à la formule classique des congrès, l’événement « Médecine personnalisée en Afrique : rencontres pour une santé mondiale » n’a pas misé sur la parole d’experts de la médecine personnalisée. Elle a misé plutôt sur la parole d’experts africains, eux-mêmes centrés sur des préoccupations de santé propres à l’Afrique, mais appelés à découvrir le principe de la personnalisation et à échanger leurs réflexions à son contact. Quels potentiels nouveaux? Quels obstacles à vaincre? Quelles réflexions scientifiques ou pratiques ajouter au débat?
LE PREMIER CONGRÈS AFRICAIN EN MÉDECINE PERSONNALISÉE
s’est tenu les 6 et 7 mai 2019 à l’Hôtel Méridien Re-Ndama de Libreville
Grande dame de la cardiologie et de la santé publique gabonaise, Dr Anne-Marie Antchouey-Ambourhouet a prononcé le mot d’accueil en tant que coprésidente de congrès et grande marraine de l’événement, sans qui rien de ce grand projet n’aurait été possible.
De gauche à droite, première rangée avant: l’Honorable Jean de Dieu Moukagni-Iwangou, Ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, Dr Jean-Bruno Boguikouma, Recteur de l’Université des sciences de la santé de Libreville, Dr Yves Tremblay, Président du congrès, Prof. Violaine Lemay, co-présidente du congrès.
Deuxième rangée: Professeur Ibrahima Konaté, doyen de la faculté de médecine et représentant de la Conférence africaine des doyens des facultés de médecine d’expression française (CADMEF), Prof. Jean-François Meyé, Doyen de la faculté de médecine de L’USS Libreville, Prof. Étienne Lemarié, représentant de la Conférence internationale des doyens et des facultés de médecines d’expression française (CIDMEF).
Différents médias ont couvert l’événement, dont les chaînes Gabon première et Gabon 24 —
Dr Pavel Hamet en entrevue (UdeMontréal, directeur du département de médecine génique du CHUM)
Dr Anne-Marie Antchouey-Ambourhouet, cardiologue et DG de la santé publique du Gabon aux côtés de Maîtresse Rebianot, célèbre et très respectée praticienne de médecine traditionnelle africaine.
De jeunes chercheurs sont venus exposer leurs travaux en médecine personnalisée ( Dr Claire Joane Chrysostome, médecin, détentrice d’une maîtrise en santé publique et chercheure poursuivant une thèse sur la médecine personnalisée adaptée à l’identité culturelle haïtienne et M. Édouard Habib, avocat spécialisé dans l’encadrement juridique de la médecine de précision et poursuivant une thèse en droit sur les régulations mondiales du domaine).
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L’AIICM : soutenir l’interdisciplinarité par l’action personnalisée dans l’espace santé
L’objectif premier de l’Association internationale et interdisciplinaire sur la chaîne du médicament (AIICM/IIAPC), fondée il y a près de 20 ans, a toujours été de soutenir l’interdisciplinarité à l’intérieur d’un domaine de la santé longtemps considéré comme de la juridiction exclusive de la médecine ou du secteur biomédical. Avec le temps, les relations interdisciplinaires en santé sont devenues la norme. On ne saurait aujourd’hui parler d’une saine gestion de la santé sans relations interprofessionnelles et intersectorielles diverses —entre spécialistes de la santé, entre gestionnaires, entre paramédicaux, etc. Néanmoins, il demeure encore important de soutenir le trop rare dialogue avec les sciences humaines, le droit et la philosophie, car les enjeux de santé mondiale ne peuvent être adéquatement posés sans eux. Depuis 2015, l’AIICM a choisi d’ancrer ses objectifs au thème révolutionnaire de la santé personnalisée, car la personnalisation suppose toujours le rapprochement avec ces savoirs extra-médicaux mais néanmoins cruciaux.
Médecine et santé publique globales et personnalisées : zone des «4 P»
Si, à l’origine, on parlait volontiers de « médecine personnalisée », on discute aujourd’hui beaucoup «d’action de santé personnalisée », car les idéaux de base de la médecine personnalisée s’étendent aujourd’hui à toutes les actions des secteurs de la santé. On a référé traditionnellement à ces idéaux à travers ce qu’on a appelé la médecine des « 4P »… —On pourrait tout aussi bien parler des «5P », tant la Pluridisciplinarité lui est nécessaire…
1-L’idéal d’une approche non plus standard ou identique pour toutes les personnes porteuses d’un même diagnostic, mais adaptée aux caractéristiques d’une personne, d’un groupe (local, national ou continental), soit d’une Personnalisation de l’action de santé;
2- Une des façons de poursuivre l’idéal d’une action de santé personnalisée peut résider dans l’adaptation aux caractéristiques génomiques des patients et des populations. À l’occasion des avancées spectaculaires entraînées par la connaissance du génome humaine, la médecine génique a fait des bonds de géants et donne lieu à la médecine de Précision, fer de lance de la médecine personnalisée en Amérique du Nord et en Europe.
3-À partir du moment où la connaissance des prédispositions génétiques s’accroît, l’idéal de Prédiction apparaît : quand on connaît le risque de développer telle maladie en présence d’un gène donné, toute une série d’actions préventives apparaissent. En convergence, avec le développement des approches de santé publique, l’idéal de l’action de Prévention s’étend. En santé comme ailleurs, mieux vaut prévenir que guérir…
4-Le monde change. Aujourd’hui, un peu partout sur la planète: a) une nouvelle catégorie de patients apparaît, désireux de participer davantage aux actions de santé les concernant, par exemple via la consultation d’informations médicales sur internet; b) on déplore des problèmes d’inobservance thérapeutique ou de résistance psychologique du patient liés aux façons inadéquates d’exercer l’autorité de santé par les professionnels. Face à ces nouveautés apparaît l’idéal de Participation du patient, supposant un certain réaménagement des positions et des rôles à l’intérieur de la relation patient/acteur de la santé : le patient est plus actif, plus renseigné qu’il ne l’était auparavant; l’acteur de santé est moins « directif », plus conscient des avantages d’une attitude participative du patient en termes d’observance thérapeutique.
Nouvelle ère du savoir africain? Le premier congrès africain en santé personnalisée a eu lieu!
Une avancée de la médecine de précision, de la recherche en génomique mais aussi de l’ensemble du renouveau qu’est la personnalisation pourrait signifier d’importantes opportunités aux scientifiques du continent et les participants du congrès s’en sont montrés très conscients. L’Afrique en serait première bénéficiaire, car ses résultats rendraient possibles des interventions préventives de première ligne jusqu’alors impensables, mais aussi l’élaboration de thérapies plus efficaces parce qu’adaptées au génome des populations africaines. En outre, n’oublions surtout pas que l’Afrique est le berceau génétique de l’humanité (1): c’est dire que ces résultats seraient importants et utiles à toute la planète, donc valorisés par la communauté scientifique internationale et, par voie de conséquence, sujets à de plus amples opportunités de financement.
Ces rencontres se sont inspiré à la racine de la philosophie du leader mondial Boaventura De Sousa Santos . Cette philosophie soutient un nouveau rapport au savoir qui se veut « désuniversalisant » des formes occidentales, nordiques et dominantes de la connaissance, mais rassembleur de tous les savoirs dans leur but universel d’intérêt humain. Une philosophie du savoir émancipatrice des savoirs du Sud et devenue urgence mondiale devant la dominance d’un savoir médical construit au Nord, davantage utile au Nord à travers ses préoccupations propres et ses dispositifs à technologie luxueuse, mais coûtant paradoxalement plus au Sud en termes d’essais cliniques, de coûts environnementaux de la production pharmaceutique, de dévalorisation des savoirs locaux, etc. En l’occurrence, l’intégration aux réflexions du contexte africain supposera l’objectif permanent d’une recherche de pratiques thérapeutiques à « technologie frugale », i.e. explicitement conçues pour des pays moins marqués par l’hyperconsommation technologique et technique que ceux des continents européens ou nord-américains. Elle supposera aussi la maximisation du fait que, le statut africain de « berceau génomique de l’humanité » place le continent scientifique en position de force rééquilibrante dans la définition des partenariats de recherche.
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(1) Voir par exemple: « Assembly of a Pan-genome From Deep Sequencing of 910 Humans of African Descent », 2018, Nature Genetics, 0ct 8, doi.org\10.1038/ s41588-018-0273-y
Ce contenu a été mis à jour le 28 juin 2019 à 4 h 56 min.